Melon Land

Tu t'appelles Raoul, tu as la trentaine, tu n'as pas vraiment de vie sociale, enfin un peu, mais tu as surtout un smartphone.

Tu es timide, tu es réservé, tu es méfiant, dans la vraie vie.

Tu es de droite ou de gauche, enfin surtout là où sont la majorité des gens selon les moments de la vie démocratique.

Tu es moche, peut-être. En tous cas, tu ne soulèves pas les foules, ou pire, c'est la foule qui n'arrive pas à te soulever (je sais pas si je vais assumer cette phrase jusqu'au bout tiens, on va voir).

Tu es mytho, tu aimes bien te raconter des histoires, tu es du genre à t'imaginer faisant un discours devant une horde de gens criant ton nom.

Tu crois être original. Tu es un hipster. Tu as ton style et tu ne supportes pas qu'on te plagie.

Tu aimes avoir ta cour 2.0 autour de toi, ton panier de moutons, ta Team.

Tu penses d'ailleurs que tu mérites d'être un cran au dessus, parce que toi tu as du talent.

Tu manies le bon mot, la bonne vanne, au bon moment, toujours sur la brèche.

Tu te prends au sérieux.

Mais la vie virtuelle n'est qu'une vaste farce, buddy. On apprend, on échange, on rit, on s'agace. On tisse des liens ou on en tisse pas. On est protégé par notre écran, notre pseudo. On a pas besoin de faire des compromis. On ferme son compte et on revient sous une autre identité.

Tu ne deviendras pas célèbre.

Tu ne gagneras pas le Prix Nobel de la vanne.

Tu n'auras pas davantage d'amis, puisque tu n'échanges qu'avec des gens comme toi (tu sais, la belle bande d'originaux. Oh, wait ...)

Ta vraie vie sera toujours la même qu'avant.

Ton melon ne te servira nulle part ailleurs que sur la toile.

Alors ... je sais pas, redescend sur Terre. Humilité.

Un oeuf n'est peut-être qu'un oeuf, mais il se peut que ce soit un bon oeuf. On ne mesure pas la qualité d'une personne à la quantité de ses tweets ou de ses followeurs.